Mon intervention lors de la discussion générale de la mission Recherche, enseignement supérieur du projet de loi de Finances pour 2021 :
Mme la Présidente, Mme la Ministre, madame et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues,
Ce projet de loi a le mérite de relever les financements à destination de la recherche et de l’enseignement supérieur. Même si ce n’est pas le choc budgétaire espéré, comme le souligne la Commission des Affaires économiques.
La hausse du budget rompt avec des années de sous-investissement, qui ont eu des conséquences dramatiques : dégradation des conditions de travail, tension croissante dans les universités qui doivent accueillir toujours plus d’étudiants avec des moyens qui ne suivent pas.
Nous souhaitons aussi saluer les mesures sociales en direction des étudiants, en particulier la mise en place du ticket de restau U à 1 euro. Les bourses sont revalorisées pour la deuxième année consécutive – après, rappelons-le tout de même, un gel en 2017 et en 2018. Pour le groupe écologiste, l’ensemble des prestations sociales devrait suivre le coût de la vie, c’est-à-dire être (a minima) indexées sur l’inflation. Quand ce n’est pas le cas, c’est le pouvoir d’achat des plus pauvres qui s’érode.
Pour autant, ce projet de budget comporte des insuffisances majeures.
Sur la recherche d’abord. Une partie des fonds additionnels ira financer les nouveaux postes précaires créés par la Loi de programmation pour la Recherche, au détriment des postes titulaires. Les 700 recrutements de titulaires annoncés sont une réponse insuffisante à la pénurie de postes.
Je suis inquiète de la place accordée aux financements par appels à projet. Sur 600 millions d’euros d’augmentation du budget, 140 vont à l’Agence nationale de la recherche. Celle-ci bénéficie aussi de financements importants par le biais du plan de relance. A cela s’ajoutent les programmes d’investissements d’avenir, dont une part importante va à la recherche. Ces financements sont bienvenus – le problème est qu’ils sont tous organisés selon la modalité des appels à projets.
Les appels à projet sont un bon complément du financement récurrent, mais leur généralisation n’est ni un gage d’excellence, ni un gage d’efficacité.
L’obtention des financements de l’Agence Nationale de la Recherche est déséquilibrée selon les structures et les territoires : une vingtaine de grandes universités concentre environ 80% des financements.
Les équipes dépensent du temps et de l’argent pour candidater aux appels à projet, sans garantie de succès. On estime que les candidatures auprès de l’ANR auront un taux d’échec de 75 à 80%. Ce gâchis doit nous alerter. Le temps de travail des chercheurs serait, dans de nombreux cas, mieux employé à faire ce qu’ils font le mieux : de la recherche !
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Par ailleurs, le groupe écologiste ne partage pas certaines priorités affichées concernant les domaines de recherche. J’ai été assez surprise, je dois dire, en voyant que le programme 190 sur l’énergie et la mobilité durable est en grande partie axé sur l’aéronautique et le nucléaire. Poursuivre des mirages tels que l’avion vert ou un nucléaire propre, est-ce vraiment raisonnable face à l’urgence écologique ?
Sur le volet enseignement supérieur et vie étudiante, nous avons mentionné plus tôt les évolutions positives.
Mais il faut mettre les financements en regard avec la crise exceptionnelle que nous traversons, qui aggrave encore une situation fortement dégradée.
La France dépense sensiblement moins par étudiant qu’il y a quinze ans. Vous pouvez certes indiquer, Madame la Ministre, que ces calculs ne prennent pas l’ensemble des facteurs en compte – il n’empêche que les conditions d’études se dégradent.
Dans l’université que je connais le mieux, l’université de Bordeaux, les cours de TD sont passés dans les dernières années de 12 séances par semestre à 10, puis à 8 séances seulement. Les amphithéâtres sont bondés, et les préfabriqués temporaires sont devenus des salles de cours permanentes. Même les marqueurs pour écrire sur les tableaux sont rationnés.
Un effort exceptionnel serait nécessaire aujourd’hui, pour tenter de rattraper les coupes budgétaires du passé, mais aussi accueillir un nombre d’étudiants sans précédent.
Dans ce contexte, l’augmentation des financements pour la formation initiale n’est pas à la hauteur des enjeux.
Je regrette également que le budget de l’Action 3 du programme « Vie étudiante », qui concerne notamment la santé des étudiants, soit en baisse. Et ce alors que la renonciation aux soins est un problème bien connu, et que les besoins – qu’ils soient d’ordre physique ou psychologique – vont augmenter avec le contrecoup de la crise sanitaire.
Nous saluons l’effort budgétaire, mais il reste néanmoins en-deçà de ce que les écologistes défendent depuis des années. A moins d’améliorations significatives, le groupe écologiste ne votera pas le budget de cette mission.